Formation professionnelle: l'accord en 7 points clés

 
Au terme d'une négociation laborieuse, syndicats et patronat sont parvenus dans la nuit de vendredi 14 décembre 2013 à un projet d'accord sur la formation professionnelle destiné notamment à la rendre plus accessible aux chômeurs et dont la pierre angulaire sera un compte personnel de formation.Si côté syndicats, les signatures de la CFDT, de la CFTC et de la CFE-CGC semblaient acquises, assez pour entériner le texte proposé par le Medef, la CGT et la CGPME s'opposent à ce texte. La CGT estime que le projet du Medef aboutit à "diviser par deux l'argent de la formation" et déplore que le texte ne prévoie "rien" pour la formation des demandeurs d'emploi, érigée en priorité par le gouvernement.

Guerre patronale. Le volet "financement" du texte (lire ci-dessous) a cristallisé les tensions patronales. La CGPME a jugé à l'issue des discussions que le projet du Medef, soutenu par l'UPA, restait trop défavorable aux PME, parents pauvres de la formation. Dans un entretien à L'Entreprise, le 14 décembre 2013, Jean-Michel Pottier, chef de file de la CGPME, s'indigne: "Désormais, ce sont les petites entreprises qui vont payer pour les grandes!"

Fléchage. Le gouvernement, qui a maintenu la pression pour que les partenaires sociaux parviennent à un accord, menaçant sinon de reprendre la main, voit dans cet accord la possibilité de réorienter l' " argent de la formation " vers la formation des chômeurs. "Il y a des milliards chaque année qui ne sont pas utilisés pour les demandeurs d'emploi, ce sont ceux qui bénéficient le moins de la formation", a rappelé vendredi 13 décembre Jean-Marc Ayrault. Il voit aussi dans cette réforme un nouvel outil afin d'inverser durablement la courbe du chômage, alors que Pôle emploi recensait fin octobre 3,27 millions de demandeurs d'emploi.
 
L'ANI du 14 décembre 2013 sur la formation
Consulter le texte de l'ANI
 
Ce texte servira de base à un projet de loi du gouvernement, présenté en conseil des ministres le 22 janvier 2014 et débattu au Parlement dans la foulée, en février 2014.Voici les principaux points de cet accord, qui sera transposé dans un projet de loi par le gouvernement.

1. Création d'un compte personnel de formation

C'est la pierre angulaire de cette nouvelle réforme de la formation. Le compte personnel de formation, dont le principe avait été acté par la loi de sécurisation de l'emploi de juin 2013 sera opérationnel à partir du 1er janvier 2015.Il peut être ouvert dès l'âge de 16 ans et suit la personne tout au long de la vie, même si elle se retrouve au chômage ou change d'emploi (contrairement au dispositif précédent, le droit individuel à la formation, DIF). Il est alimenté dès lors qu'on a le statut de salarié. Celui-ci bénéficie d'un nombre d'heures annuel crédité sur son compte, à hauteur de 150 heures maximum sur 9 ans. Au-delà de ces 150 heures, des abondements peuvent être effectués par l'employeur, le salarié, Pôle emploi ou encore via un accord d'entreprise. Les formations éligibles sont "obligatoirement des formations qualifiantes correspondant aux besoins de l'économie à court ou moyen terme". Sauf exceptions, le salarié devra demander l'accord de l'employeur s'il souhaite effectuer sa formation sur son temps de travail. Pour les chômeurs, pas besoin d'autorisation de Pôle emploi.
A lire sur Pourseformer: compte personnel de formation, mode d'emploi

2. Contribution unique des entreprises

Le financement émanant des entreprises, premiers contributeurs de la formation professionnelle (13,7 milliards sur les 32 milliards dépensés) devant l'Etat, les Régions et Pôle emploi, est refondu.
Le projet prévoit la fin de la contribution légale qui allait, en fonction de leur taille, de 0,55% de la masse salariale à 1,6%. Dans les faits, les entreprises de plus de 10 salariés dépensent en moyenne 2,7% de leur masse salariale en moyenne pour la formation.
A la place, l'accord prévoit une contribution "unique et obligatoire" allant de 0,55% (pour celles de moins de 10 salariés) à 1% (plus de 50), dont une partie sera mutualisée au bénéfice des petites entreprises.

>> Le détail de l'accord national interprofessionnel sur la formation sur Pourseformer

3. Augmentation du nombre de bénéficiaires du Congé individuel de formation (CIF)

Pour parvenir à augmenter le nombre de bénéficiaires du "CIF" (45.000 à 50.000 par an aujourd'hui), les entreprises de 10 à 19 salariés, jusqu'alors exonérées, devront désormais cotiser pour le financer.

4. Entretien professionnel pour tous les salariés

Il aura lieu dans toutes les entreprises, au minimum tous les deux ans, afin notamment d'envisager "les perspectives d'évolution professionnelle, notamment en termes de qualification et d'emploi".
Distinct de l'entretien d'évaluation, il sera proposé systématiquement aux salariés après une interruption de travail (congé parental, temps partiel, congé sabbatique etc.).
Les entreprises joueront-elles le jeu? Créé par l'ANI (accord national interprofessionnel) formation du 5 décembre 2003 (complété par l'avenant n°1 du 20 juillet 2005), l'entretien professionnel a dans les faits été peu appliqué...

5. Mise en place d'un conseil en évolution professionnelle

L'accord prévoir que toute personne pourra en bénéficier à titre gratuit d'un conseil en évolution professionnelle, afin de mieux identifier ses compétences, de l'aider dans son orientation et dans l'élaboration d'un projet professionnel, "sans multiplier les sollicitations auprès de différents prestataires". Il doit permettre aussi de repérer les personnes affectées par l'illettrisme. Les modalités pratiques restent à définir.

6. Renforcement des observatoires des métiers

Le rôle de l'observatoire prospectif des métiers, des qualifications et des compétences est renforcé: il permettra aux branches professionnelles d'anticiper l'évolution des métiers et des besoins, pour adapter l'offre de formation aux demandes du marché du travail.
L'observatoire sera notamment chargé de la liste des formations éligibles au compte personnel de formation.

7. Favoriser l'information de Pôle emploi

Les signataires demandent aux pouvoirs publics de "prendre les dispositions requises" pour que les conseillers de Pôle Emploi aient à accès à l'intégralité des offres de formation dans leur région.

Un financement des organisations paritaires clarifié
Par ailleurs, "une clarification majeure interviendra avec la loi pour distinguer financement de la formation et financement des organisations patronales et syndicales. Ce dernier passera désormais par un financement mutualisé spécifiquement dédié aux moyens du dialogue social, transparent et déconnecté de la collecte au titre de la formation professionnelle".


 
 



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